Napoléon 1er à Anglet (1808)

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L’empereur Napoléon 1er réside à Bayonne du 14 avril au 21 juillet 1808 afin de gérer au plus près la succession du trône d’Espagne. Pendant cette période, c’est à La Barre d'Anglet qu'il effectue le plus grand nombre de visites et goûte aussi au plaisir des bains à la Chambre d'Amour.

L’empereur arrive à Bayonne le soir du 14 avril 1808 et y reste jusqu’au 21 juillet 1808, en compagnie de l'impératrice Joséphine. Sa présence est liée aux affaires de succession du trône d'Espagne. Napoléon est donc extrêmement actif dans le domaine diplomatique mais il trouve aussi le temps de se distraire le long des plages d'Anglet, prenant quelques bains à la Chambre d'Amour. C'est à La Barre que l'empereur effectue le plus grand nombre de visites aux motifs les plus sérieux. Voici quelques anecdotes historiques choisies.

Napoléon à La Barre

Dès le lendemain de son arrivée le 14 avril 1808, il embarque au ponton des allées Marines sur la chaloupe à rames qui a été spécialement construite pour lui. C'est une embarcation de plaisance, non armée, à l'extérieur blanc et à l'intérieur rouge vif, portant, à l'arrière, un aigle en bois doré et sculpté. Son équipage d'honneur est formé de douze capitaines au long-cours, et le barreur est un lieutenant-de-vaisseau. Il reviendra une quinzaine de fois à La Barre, en chaloupe, à cheval ou en voiture avec l'impératrice. À l'embouchure, Napoléon se fait longuement expliquer la formation du phénomène naturel de la barre, ainsi que les solutions proposées pour en réduire les nuisances par le lieutenant-de-vaisseau Bourgeois, chef pilote de l'Adour avec qui il se lie d'amitié. Le 27 juin 1808, il fait armer la chaloupe du pilote major pour relever lui-même les profondeurs dans la passe et ordonner au navire « La Comète » le franchissement de l’obstacle que tous les experts croyaient impossible. Malgré quelques talonnements sur le banc de sable, le navire franchit La Barre pour répondre à la volonté de l’empereur !

Le retour du bateau corsaire

Le 28 juin 1808, Bourgeois lui fait remarquer que le sémaphore vient d'arborer un signal annonçant l'approche d'un navire français poursuivi par les Anglais. De la tour des signaux, l'empereur scrute l'océan à la lunette. Effectivement, une frégate et deux corvettes donnent la chasse à un brick. Celui-ci semble leur échapper. Selon Bourgeois, seul le corsaire bayonais Darribeau est capable d'une telle prouesse. Napoléon ne peut croire que ce soit lui. Il y a moins de deux mois qu'il est parti pour la Martinique. Si c'est lui, c'est qu'il a fait demi-tour et qu'il n'a pas rempli sa mission ! Ordonnant au bâtiment de mouiller au pied de la tour, il monte à bord, l'air furieux, pour demander des comptes au commandant de "l'Amiral Martin". Pour toute réponse, le capitaine bayonnais lui tend un pli cacheté, réponse du gouverneur des Antilles à la dépêche qu'il était chargé de lui remettre.

Défier les Anglais

Le 6 juillet 1808 embarquant sur sa chaloupe, à la cale du Moulin, l'empereur rallie la Barre, en compagnie de Bourgeois, qui l'accompagne dans sa propre embarcation. En pleine forme, Napoléon plaisante avec les rameurs. Scrutant l'océan à la lorgnette depuis la tour des signaux, il aperçoit des points blancs à l'horizon. "Les Anglais sont de retour", déclare laconiquement le pilote-major. "Il y a là une frégate, une corvette et un brick de seize, ainsi qu'un quatrième navire, plus petit, que je ne parviens pas à identifier." L'Empereur décide d'aller voir de plus près. "Il fait beau, la mer est calme, il n'y a rien à risquer, et une petite promenade au large me fera grand bien." Bourgeois est méfiant.
Après avoir fait mettre en alerte la batterie du Boucau, il prend lui-même la barre de la chaloupe impériale. Marquant un arrêt à deux milles au large, Napoléon reprend ses observations en prenant appui sur l'épaule d'un rameur. "Bourgeois, pensez-vous qu'ils nous ont été repérés ? —Sans aucun doute, Sire. En effet, toutes voiles dehors, ils se dirigent sur eux, notamment la corvette, qui distance les autres, et qui commence même à tirer. Pour le pilote-major, il faut vite faire demi-tour.— Eh bien ! retournons !" dit l'Empereur en refermant sa lunette. Les rameurs ne se le font pas dire deux fois ! La barre franchie, l'embarcation pénètre dans l'Adour au moment où la batterie de 24 du Boucau ouvre le feu sur la corvette, qui est à distance de tir. Grimpant à la tour des signaux, Napoléon observe le navire, qui s'approche jusqu'à la barre, avant de virer vent debout avec une grâce et une précision extrême.

Le plaisir des bains

L'empereur prend des bains de mer à Anglet : chacun de ces bains est accompagné d'une reconnaissance aquatique, pour prévenir quelque surprise anglaise. Pendant tout le temps que Napoléon reste dans l'eau, un détachement de cavaliers de la garde éclaire la mer, en s'y avançant aussi loin qu'il est possible de le faire sans trop de péril. Mais c'est avec Joséphine qu'il trouve des moments de complicité. Voulant la taquiner, il la pousse un jour dans l'eau toute chaussée et lui fait prendre un bain de pieds forcé. Joséphine pousse alors des cris et Napoléon rie aux éclats en marchant main dans la main le long de la plage.
Le 5 juillet 1808 après-midi, retour à La Barre, en compagnie de l'impératrice, de Duroc (premier aide de camp) et de Madame de Montmorency-Matignon. Le long de l'Adour, la voiture, attelée de quatre chevaux, suit la crête des dunes, sur laquelle est tracé un vague sentier. Au-delà de Blancpignon, après avoir manqué de s'embourber dans un marécage, elle a beaucoup de difficultés à s'arracher au sable : l'impératrice pousse des cris d'effroi, et Napoléon la rassure en riant. Á la tour des signaux, il retrouve Bourgeois, avec lequel il s'entretient familièrement. Pendant ce temps, Joséphine, descendue de la voiture, se promène au bord l'eau où Napoléon vient la rejoindre. Mais elle craint sans doute une répétition de la scène qui s'était produite quelques jours auparavant à la Chambre d'Amour, car en voyant approcher son époux, elle fuit du côté des sables, tandis que l'Empereur la poursuit en riant...

Sources

Les Corsaires bayonnais Édouard Lamaignère - 1856

Les Journées de Napoléon à Bayonne Étienne-Édouard Ducéré - 1910

Souvenirs d'un officier polonais, scènes de la vie militaire en Espagne et en Russie (1808-1812)- Alfred-Auguste Ernouf - 1877

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